Les chants de Felya, de Laurent Genefort

Les chants de Felya, de Laurent Genefort (one shot, éditions Le Livre de Poche)
Felya est une grosse planète où des sociétés multimondiale ont installé des sites miniers. La planète, riche en matière première, fait le bonheur d’hommes dans l’espace.
Or, en bas, vivent encore beaucoup de tribus aux rites et coutumes très différentes.
Les chants de Felya raconte la vie de ses peuplades, leur survie, leurs tentatives désespérées pour garder leur âme.
Cet ouvrage rassemble 3 histoires, 3 « chants », publiés à l’origine dans la collection anticipation de Fleuve Noir, dans les années 1990. Nous avons donc à lire ici le format poche de l’intégrale publiée chez Critic en 2013 et qui comprend les textes revus et corrigés par l’auteur.
Les trois textes ici rassemblés sont :
– Le labyrinthe de chair
– De chair et de fer
– Lyane
Le labyrinthe de chair présente Lorin, issu du peuple des extracteurs de fer. Le jeune homme, qui porte tatoué sur son visage le labyrinthe de sa destinée, va être puni par le sage de sa tribu. Alors que cette dernière est obligée de s’exiler, le sage oblige Lorin a rester en arrière pour aller mener pénitence dans une lande empoisonnée. S’il survit, aidé par son jeune frère, il sera autorisé à rechercher et retrouver sa tribu. Son labyrinthe sera sa seule carte.
Dans ce texte, on plonge au coeur d’une planète singulière, à l’environnement luxuriant et hostile. Mais on se rend compte que le plus dangereux ne vient pas de la terre, plutôt du ciel. Les hommes de la FelExport la puissante compagnie multimondiale exploite sans pitié la planète qu’elle a choisi d’exploiter. On découvre, avec une plume riche en détails immersifs, la beauté d’un environnement, la diversité des cultures, les coutumes des peuplades. C’est dépaysant, luxuriant, un vrai plaisir. Des rebondissements jalonnent le texte et certains sont bouleversants. La planète ne fait aucun cadeau aux protagonistes, pas plus qu’au lecteur.
Dans la suite de ce texte, De chair et de Fer, on retrouve Lorin et Soheil. Là encore, l’histoire repose sur un voyage, sur une quête, initiatique autant que survivaliste. Lorin est enrôlé de force dans la milice armée, ce qui n’est pas sans rappeler les heures les plus sombres de notre histoire. Là encore l’auteur raconte avec une foule de détails les péripéties de Lorin.
J’ai trouvé ce texte un peu en-dessous du premier, probablement car l’effet de découverte et la répétition du schéma narratif m’ont semblé parfois long. Cependant c’est aussi prenant que le premier récit et on se laisse entraîner dès les premières pages. Il y a beaucoup de bonnes idées pour créer un univers vaste et très détaillé. Toutefois, bien que l’auteur use de beaucoup de mots nouveaux pour désigner les éléments extra-terrestres de la planète, il le fait si bien que le lecteur n’est jamais perdu. Tout se matérialise parfaitement dans l’esprit du lecteur qui avance sur le même chemin que les héros du livre.
Ce second texte a tout du blockbuster américain. On y retrouve des personnages masculins tout en agressivité, des victimes innocentes, des combats rythmés et soutenus, de l’injustice, des victoires… Laurent Genefort fait preuve à nouveau d’un grand talent pour mettre en place un univers, ici le parfait opposé du vaste univers verdoyant décrit dans la première partie. Les éléments sont ici plus gris, plus dur, et beaucoup moins naturel.
Enfin, le troisième chant, Lyane, est certes dans la continuité des deux premiers, mais marque une rupture. Alors que les deux premiers chants pouvaient presque être réunis dans le même, on fait ici un grand bon en avant (13 ans) pour suivre les pas de la fille des protagonistes des premiers chants. Là encore, la fuite semble être le fil rouge du roman tout entier puisque la malheureuse Lyane, de par sa filiation, va être condamnée elle aussi à l’exil.
Un troisième chant tout aussi accrocheur que les deux premiers. Lyane est une de ces jeunes héroïnes qui, telle une Jeanne D’arc, saura aller au-delà d’elle-même, guidée par une voix d’outre-tombe, afin de se dépasser pour accomplir sa grande destinée. On vit ici dans les bidonvilles de Felya, dans un autre espace de la planète. On y suit également le parcours d’un jeune chasseur de prime rêveur, dont l’objectif est d’accomplir la volonté de la FelExport pour aller dans l’espace.
Ce dernier texte rend compte de toute l’horreur de la situation à laquelle est livrée Felya. Ses habitants se font exploiter bien souvent à leur insu, et quoi qu’ils fassent, la multimondiale a les moyens de parvenir à ses fins. Dès lors, peut-on échapper à son destin ?
Les chants de Felya est un très agréable moment de lecture. J’ai vécu toute la palette des émotions en lisant ces textes emprunts de poésie et d’une grande philosophie.
De la science-fiction comme j’aime.
Pour qui : les lecteurs qui aiment la sf, découvrir de nouveaux mondes, d’échapper.
Les + : L’écriture de l’auteur est un régal. La plume de Laurent Genefort est très riche en détails immersif qui nous prennent et nous entraînent sur une planète totalement inconnue dès les premières phrases. Un véritable voyage aux confins de la galaxie. Les personnages centraux sont attachants, et toutes les peuplades sont diverses, il n’y a pas de redondance. Un gros travail d’écriture en amont, passionnant.
Les – : Malgré le thème de la fuite et du voyage initiatique, je regrette qu’il n’y ait pas un véritable arc narratif déployé dans les trois romans et qui aboutirait à une vraie fin. Ici, la fin du troisième chant pourrait sans peine donner une multitude de suites.
Infos pratiques
Poche: 608 pages
Editeur : Le Livre de Poche (16 mars 2016)
Collection : Science-fiction
Langue : Français
ISBN-10: 2253183946
ISBN-13: 978-2253183945