Archives mensuelles : mars 2021

Community, de Luna Joice

Community, de Luna Joice (one shot, éditions Hugo Roman)

Nous sommes en 3006. La planète est désormais contrôlée par une puce implantée dans les cerveaux humains afin de garantir une vie heureuse et utile à la communauté. Lyah est une jeune fille très curieuse qui se questionne beaucoup sur le monde qui l’entoure. Quand vient le jour de l’Assignation, cette cérémonie obligatoire durant laquelle on choisit pour elle sa carrière et son compagnon, elle est inquiète : et si elle ne devenait pas cultivatrice ?
Ce jour va faire changer sa vie, et sera le début d’un grand bouleversement pour l’humanité toute entière.
La curiosité est-elle est un défaut ?

Je ne connaissais pas du tout l’autrice avant de gagner ce roman lors d’un concours. Le pitch me plaisait et j’ai eu l’impression que je pouvais être le public auquel se livre se destinait. La biographie de Luna Joice nous indique qu’elle aime mélanger les genres. On peut dire que ce point est le plus représentatif de son oeuvre.
La lecture n’est pas sans rappeler certaines séries comme Hunger Games ou The Book Of Ivy. Classiquement, on découvre un monde où les humains se sont regroupés par castes pour survivre, et doivent subir une assignation qui déterminera le reste de leur vie au cours d’une journée décisive. Comme dans les romans Young-Adults à succès, nous avons affaire à une jeune héroïne qui va comprendre que la société n’est pas si vertueuse qu’on essaie de lui faire croire, et va se dresser contre l’ordre établit.
J’ai été plutôt mitigée sur l’univers présenté. Premièrement parce qu’il est très loin de nous (mille ans), et pourtant l’héroïne passe son temps à parler, écouter et visionner des choses de notre époque. Ensuite, les moeurs ont certes évolués mais j’ai du mal à croire qu’un jour plus aucun humain n’éprouverait le besoin de parler avec ses cordes vocales, ni même de se toucher. Ce sont quand même les bases de notre humanité et malgré une puce électronique implantée dans le cerveau (on ne nous explique jamais si la population s’est conformée de bonne grâce à cela ou si au contraire cela s’est fait dans le sang, la rébellion etc…) j’ai du mal à croire que l’humanité entière accepterait tout cela sans se poser de questions. Même un bébé éprouve le besoin d’utiliser ses cordes vocales alors ce parti pris m’a semblé peu crédible. Aussi, les conclusions de Lyah après avoir trouvé une météorite dans sa parcelle me semblent très alarmistes. Il tombe des tas de météorites sur la planète toute l’année et nous ne sommes pourtant pas menacés.
Je ne veux pas trop en dire mais ces quelques exemples illustres les points qui m’ont fait trouver l’univers global assez faible. C’est malheureusement souvent le cas avec ce type de littérature.
Malgré tout, j’ai passé un bon moment. Le roman est bien écrit et propose de nombreux rebondissements qui permettent de garder de l’intérêt tout au long de la lecture. Beaucoup d’inattendu, de retournements de situations… j’ai apprécié aller de chapitre en chapitre pour lire la suite des aventures de Lyah. Certaines ficelles sont énormes et on voit les choses venir, mais d’autres sont un peu plus recherchées et donc bienvenue.
Community est un petit livre qui peut amener à se questionner sur notre propre société et notre quotidien. Il propose des pistes intéressantes pour le futur et touche à des sujets comme le trans humanisme. J’ai apprécié.
Mon seul vrai regret avec ce titre est que ce soit un one shot. De ce fait, l’autrice bâcle parfois son propos. Les choses vont trop vite, comme la romance qui semble avoir été ajoutée juste parce qu’il en fallait une, ou l’ellipse finale qui aurait mérité qu’on s’attarde bien plus sur l’avant, le pendant, et l’après. J’ai toujours du mal à concevoir un ouvrage de SF qui soit à la fois bon et court. L’exercice est toujours délicat, j’aurais aimé pouvoir aller plus loin ici.
Néanmoins, cette entrée en matière dans l’univers de l’autrice m’a donné envie de découvrir d’autres oeuvres de sa plume pour apprécier un nouveau mélange des genres.

Pour qui : les lecteurs qui aiment les one shot et le mélange des genres.

Les + : le livre est bien écrit et rythmé, il tient le lecteur en haleine. De nombreux rebondissements.

Les – : l’univers proposé est assez faible et donc peu crédible, certaines ficelles scénaristiques sont trop grosses, voire bâclées.

Infos pratiques
Éditeur : Hugo Roman (3 septembre 2020)
Langue : Français
Broché : 298 pages
ISBN-10 : 2755647361
ISBN-13 : 978-2755647365

Les 40 signes de la pluie, de Kim Stanley Robinson (Trilogie Climatique T1)

Les 40 signes de la pluie, de Kim Stanley Robinson (tome 1 de la trilogie climatique, éditions Pocket)

Washington, dans un futur proche. La machine climatique s’emballe, les bouleversements sont visibles, profonds.
Dans leurs laboratoires, les scientifiques tentent de faire pression sur le gouvernement pour qu’il prenne enfin des décisions de préservation de l’environnement.
Mais n’y a-t-il pas pire que ceux qui ne veulent pas voir ?
Anna, Charlie, Frank… autant d’humains au service de la science, persuadée qu’elle seule pourra sauver l’humanité.
À condition qu’on veuille les écouter, bien sûr.

Il semble que le changement climatique soit un thème de plus en plus abordé en littérature, que ce soit par les auteurs qui écrivent sur le sujet, ou les éditeurs qui publient des ouvrages sur le sujet.
Kim Stanley Robinson, dont j’avais lu l’ennuyeux 2312, revient chez Pocket avec une trilogie climatique qui m’a rapidement intéressée. Les 40 signes de la pluie est le premier tome (et le moins épais) de cette nouvelle histoire. Désireuse de renouer avec la plume de cet auteur présenté comme une référence dans son domaine, je me suis laissée emporter par le pitch qui promet catastrophes naturelles et tensions climatiques.
Or, à la fin de ce premier tome, je dois reconnaître que je n’ai absolument pas lu ce que je m’attendais à trouver entre ces pages.
J’ai apprécié ma lecture, mais ce n’est pas exactement ce dont on nous parle. La faute à l’auteur ? Ou à l’éditeur ? Je ne saurais dire.
Toujours est-il que l’histoire se centre sur des scientifiques dans leurs bureaux, et que le changement climatique ne se sent pas vraiment dans le roman. Alors que je m’attendais à une tension allant crescendo, on nous explique simplement à quel point les protagonistes transpirent lorsqu’ils mettent le nez dehors. De bref passages en-dehors de l’histoire se font alarmistes, mais l’histoire en elle-même ne s’en fait pas beaucoup écho. L’auteur parle bien de la fonte des glaciers, de l’inversement et du ralentissement des grands courants marins… mais je m’attendais plutôt à lire une sorte de thriller, de course contre la montre, et cela n’a pas été le cas. On est plutôt en coulisses, dans les bureaux des politiques chargés de voter les lois impactantes ou non, et quoi qu’il en soit, déterminantes pour l’avenir de l’espèce humaine.
Bien qu’étonnée de ne pas avoir trouvé ce que j’étais venue chercher, j’ai tout de même apprécié ma lecture. Certes, Les 40 signes de la pluie (dont vous ne saurez jamais lesquels sont-ils) n’est pas le thriller SF auquel je m’attendais, mais il est un très bon ouvrage de prospective.
Très réaliste dans son cadre et ce qu’il décrit, il nous propose une version pessimiste mais très crédible de ce que pourrait être notre futur proche. Et surtout, il nous exaspère à nous montrer l’envers d’un décors que l’on ne voit jamais, de notre côté de la barrière. L’incapacité des chercheurs à faire prendre conscience de l’urgence, l’impossible volonté des puissants à ne pas perturber l’ordre établi, le désespoirs des nations qui savent qu’elles n’ont pas tiré le bon numéro à la loterie de la géographie… Tout cela laisse à voir un futur qui n’est ni rose ni bleu, mais bien aussi sombre que la boue charriée par les pluis torrentielles créées par le changement climatique.
Les personnages nous sont présentés dans leur quotidien, presque banalisés, alors qu’on se rend assez vite compte qu’ils occupent des fonctions importantes. J’ai bien aimé suivre leur quotidien, qu’ils soient seuls ou en famille. Quelques préoccupations très futiles nous rappellent qu’ils sont humains, et qu’ils sont finalement comme les autres.
L’écriture est fluide et le livre se lit facilement, en dépit de quelques passages un peu longs et inutiles. L’auteur a semble-t-il voulu étoffer son univers en y apportant quelques scènes dispensables (scène de la suspension sur le mobile du hall pour aller rechercher une lettre, par exemple).
Quelques pistes sont esquissées pour la suite, ce qui m’a donné envie de la lire. J’espère que les portes ouvertes ici seront bien refermées et que l’histoire progressera de manière plus dynamique dans le tome 2.
Vu la situation dans laquelle l’auteur a laissé ses personnages à la fin de ce volume, il y a fort à parier que les choses ne font que commencer.

Pour qui : les lecteurs qui aiment les récits réalistes, et crédibles.

Les + : Des personnages très humains aux préoccupations à la fois ordinaires et extraordinaires, une plongée dans les coulisses de cet enjeu mondial que nous connaissons bien, une vision pessimiste mais crédible de ce qui nous attend. Le livre est plus facile à lire qu’un 2312, par exemple. Bien qu’initialement paru en 2004, ce titre reste tout à fait crédible, et l’est même plus que jamais, malheureusement.

Les – : Le pitch du roman et son résumé ne collent pas du tout à ce dont on nous parle. À la fin du livre, je n’ai toujours pas compris ce que sont « les 40 signes de la pluie ». C’est un peu comme si le concept, le résumé et le titre avaient été trouvés avant d’écrire l’histoire, qui est assez différente de ces trois éléments.

Infos pratiques
Éditeur :
Pocket (14 janvier 2021)
Langue : Français
Poche : 512 pages
ISBN-10 : 2266183559
ISBN-13 : 978-2266183550

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