2312, de Kim Stanley Robinson

2312, de Kim Stanley Robinson (one shot, éditions Actes Sud)

Swan est une artiste spécialisée dans la conception de biodômes destinés à accueillir de la population sur des planètes hors de la Terre. Un jour, sa grand-mère, Alex, scientifique reconnue, décède. En guise de cadeau d’adieu, elle laisse à Swan de mystérieux documents qu’elle doit transmettre à une partie de son équipe de travail. Mais Swan, dévastée par le chagrin, ne connait rien des fréquentations ni des motivations de sa grand-mère.
Cette quête de la vérité va l’entraîner sur bien des planètes et ce qu’elle va découvrir pourrait remettre en question toute sa conception de la vie.

J’ai reçu ce titre de la part des éditions Actes Sud sans m’y attendre, si bien que je ne savais justement pas à quoi m’attendre à sa lecture.
Une telle brique de SF (613 pages écrites en tout petit) me donnait envie de me plonger dans cet univers dépaysant. En cela j’ai été servie.
En effet, l’intrigue démarre fort. A la mort d’Alex, nous faisons la connaissance de Swan, sa petite fille éplorée qui cherche à faire son deuil. Or, Alex lui a laissé de drôles de messages. Qu’est-ce que cela signifie ? Sur quoi travaillait-elle ? Qui en veut à la cité de Terminateur ? Qui était cet inconnu aperçu sur un écran dans une zone où personne ne devrait se trouver ?
Alors que les premières pages posent une intrigue qui a tout pour faire un thriller palpitant, les choses s’enlisent. L’auteur commence à nous dépeindre un univers où les planètes sont petit à petit colonisées par l’espèce humaine, depuis longtemps échappée de son berceau originel qu’est la Terre. Une vision d’un monde plutôt noire dans laquelle l’auteur s’échine à nous en apprendre plus sur les techniques de terraformation, de colonisation, de peuplement (notamment à travers une magnifique scène où les animaux sont réintégrés sur la Terre dans des bulles), de commerce et de mœurs inter-espèces… Mais au détriment de l’intrigue, qui elle n’avance pas.
Kim Stanley Robinson pose pourtant des questions intéressantes au sujet de l’intelligence artificiel et de ses dérives. Il nous amène à nous interroger sur les robots, les programmes… tout cela est passionnant. J’aurais aimé en savoir plus, creuser encore davantage la question et le raisonnement. Mais non.
J’ai eu l’impression que cette intrigue n’était qu’un prétexte pour l’auteur afin de lui laisser construire son monde. Ainsi, le roman fourmille de longs passages descriptifs de planètes, de cultures et de systèmes de fonctionnement… dans lesquels j’avoue m’être perdue plusieurs fois en raison d’un décrochage d’attention. L’auteur coupe son roman avec des listes et des textes censés apporter un peu d’épaisseur à son univers, mais toutes ne sont pas faciles à comprendre. Par exemple la toute dernière promenade quantique (presque une purge à lire) semble révéler une information que j’étais excitée d’avoir décelée mais… en fait je n’en sais rien. Et la fin du roman ne vous en apprendra pas plus sur ce qui aurait pu être un sacré retournement de situation.
Car tout au long du roman l’histoire, elle, piétine. On n’avance pratiquement pas, et la romance instaurée entre les deux principaux personnages peine à convaincre.
En effet, les personnages du roman ne sont pas attachants. Je ne me suis pas attachée à eux. Swan, qui a pourtant du potentiel et qu’on nous présente au début comme très émotive, apparait très vite comme une femme au caractère bougon, peu appréciable et sans cesse de mauvaise humeur. Et ce n’est pas Fitz Wahram, constamment décrit comme un crapaud, qui remontera le niveau. Ce personnage aurait pu être attachant mais on sent que l’auteur lui-même n’y tient pas. Les personnages secondaires se perdent dans le récit et n’ont pas de reliefs.
2312, c’est une année. Une année dont on nous dit plusieurs fois qu’elle est charnière et qu’il s’est passé quelque chose.
Mais quoi ?
A la fin du roman, je n’ai toujours pas compris en quoi cette année méritait à ce point d’en faire un fromage. Bombardement d’une planète ? Entrée en guerre ? Épidémie ? Conflit diplomatique ? Prise de pouvoir de l’Intelligence Artificielle ?
Non, rien de tout cela.
En bref je n’ai pas réussi à cerner le but de ce texte, qui a pourtant beaucoup de bonnes pistes. Pourquoi avoir tracé de si intéressantes lignes si ce n’est pas pour aller au bout des choses ? Il y avait sans doute possibilité de développer bien plus l’intrigue sur les I.A et le travail à la mort d’Alex, mais l’auteur ne l’a pas fait. De plus, on ne retrouve pas la subtilité d’un Peter F.Hamilton, par exemple, ce qui confère des lourdeurs et des longueurs dans le texte.
Le plus décevant est que quelques jours avant le début de ma lecture, j’ai assisté à une conférence sur la SF au festival les Aventuriales à Ménétrol, où cet auteur a été cité comme étant un maître du genre. Dommage que cet ouvrage ne m’en ai pas donné l’impression. Une erreur de parcours ?
Il faudra lire un autre texte pour avoir un avis tranché sur le sujet, mais espérons qu’il sera moins épais que celui-ci.

Pour qui : les lecteurs qui aiment la SF et tout savoir de la création de mondes.

Les + : beaucoup d’informations sur le monde de fonctionnement d’un univers étendu dans notre galaxie, sur des cultures diverses et sur la création d’habitats viables sur d’autres planètes. On voyage beaucoup d’une planète à l’autre et il est appréciable de voir que l’auteur a su dépeindre la Terre d’une manière convaincante, bien que catastrophique.

Les – : des pistes abordées pas assez développées, une intrigue qui démarre bien mais se perd au fil du temps, des passages descriptifs très longs et qui n’apportent rien, des personnages auxquels on ne s’attache pas.

Infos pratiques
Actes Sud Littérature
Collection :
Exofictions
Sortie :
Septembre, 2017
Pages :
624 pages
traduit de l’anglais (États-Unis) par :
Thierry ARSON
ISBN :
978-2-330-07534-7

9 Commentaires

  • Ping : 2312 – Kim Stanley Robinson | Le culte d'Apophis

  • On en lit assez peu de bien …

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    • Malheureusement après ma lecture et la rédaction de ma chronique je suis allée lire d’autres avis pour voir si le souci venait de moi, mais non. Il semble que nous sommes nombreux à avoir ressenti la même chose en lisant ce titre, ce qui est fort dommage car il a beaucoup de potentiel et possède un fond des plus intéressants.

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  • lael chezlaventurierdesreves

    As tu lu sa trilogie sur Mars ? C’est ce qui a fait sa réputation. Et je n’ai pas accroché du tout, pour les même raisons que tu evoques, à savoir l’auteur detaille en long en large et en travers le processus le terraformation et la planète mais oublie les personnages et l’intrigue, le tout sur un pavé énorme.

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    • Hello !
      Houlà tu m’inquiètes !
      Je n’ai pas lu cette trilogie mais comme on m’en a parlé plusieurs fois je compte le faire si l’occasion se présente. Habituellement j’aime assez les pavés de SF mais si c’est du même genre que 2312 je pourrais bien consacrer mon temps à d’autres titres. Merci pour ton commentaire, j’en prends bonne note =)

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      • Je suis pas un spécialiste pour cet auteur, mais je crois que si c’est aussi bardé de descriptions, au moins ça va quelque part. J’avais d’ailleurs eu l’occasion de lire le prologue, et je dois dire que j’avais plutôt accroché.

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        • Bonsoir, merci pour ton avis ! J’ai eu le premier tome en main récemment à l’occasion de la réédition récente en format poche chez Pocket mais j’ai hésité. Pourquoi pas la prochaine fois 🙂

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          • N’hésite pas. Pour te raconter une expérience récente, je lis un classique de SF (l’intégrale de « Fondation ») dans lequel j’ai eu du mal à rentrer sur près de 400 pages, maintenant je n’arrive plus à m’arrêter. Alors mieux vaut donner une chance aux bouquins…

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